martes, 25 de agosto de 2009

La triste histoire de Jacinta

La triste histoire de Jacinta, une indienne otomí condamnée à 21 ans de prison, pour avoir supposément pris en otage 6 policiers fédéraux 1/2

2009 août 24
by Jade Latargère







La semaine dernière, Jacinta Francisco Marcial, une indienne otomí de l’Etat de Querétaro, a été déclarée « prisonnière de conscience » par l’organisation Amnistie Internationale.

Avec cette déclaration, Aministie Internationale espère aider à la libération de Jacinta, qui a été condamnée à 21 ans de prison par les autorités mexicaines, pour avoir supposément pris en otage 6 policiers fédéraux.

L’organisation mexicaine Miguel Agustín Pro Juárez A.C, qui assure la défense légale de Jacinta, a précisé lors de la conférence de presse, qu’avant de clamer l’innocence de Jacinta, elle a « réalisé un ardu travail de documentation, qui lui permet de cautionner cette affirmation ».

Les faits

Le 26 mars 2006, 6 policiers fédéraux de l’Agence Fédérale d’Investigation (AFI) sont arrivés dans le village de Santiago Mexquititlán, dans l’Etat de Querétaro. Les policiers affirmaient qu’ils avaient reçu l’ordre de confisquer les stupéfiants et DVD pirates qui se vendent sur la place du marché (comme dans tout le Mexique).

Mais curieusement, les policiers « ne portaient pas d’uniforme et aucun papier officiel où on leur ordonnait de réaliser cette opération ». Face à cette situation plus ou moins irrégulière, plusieurs commerçants de Santiago Mexquititlán se sont opposés à être dépouillés de leurs marchandises et ont exigé le remboursement des produits abîmés par les policiers. La tension est rapidement montée, et les policiers ont finalement accepté de se rendre dans le village voisin pour réunir de quoi compenser les commerçants. Il se décida qu’un des policiers resterait aux côtés des commerçants en guise de garantie du retour de ses coéquipiers. Selon plusieurs témoins, le policier est resté à tout moment en communication avec ses supérieurs et n’a souffert aucune agression. L’incident s’est terminé à 19heures, après que les commerçants aient reçu l’argent voulu.

Mais ce que les commerçants ignoraient, c’est qu’immédiatement après avoir abandonné le village de Santiago Mexquititlán, les policiers se sont rendus à la Procuraduría General de La República pour présenter une plainte pour privation de liberté (« secuestro » en espagnol). Le 3 août 2006, Jacinta Francisco Marcial, qui vend des glaces et des boissons fraîches sur le marché de Santiago Mexquititlán, est arrêtée, accusée d’avoir pris en otage les 6 agents, et condamnée à 21 ans de prison. Deux autres femmes du village, Teresa González et Alberta Alcántara, sont également arrêtées.

Les arguments de la défense

Pour les organisations Amnistie Internationale et Centro de Derechos Humanos Miguel Agustín Pro Juárez AC, Jacinta Francisco Marcial est « aujourd’hui en prison à cause de différentes caractéristiques qui la rendent très vulnérables face aux graves déficiences du système de justice mexicain : son origine ethnique, sa condition de femme et sa situation économique ».

Car pour les avocats de Jacinta, aucun policier n’a été pris en otage le 26 mars 2006 à Santiago Mexquititlán.

« Pour nous le délit de privation de liberté n’a pas été commis, car il s’agit d’une réponse légitime des commerçant face aux abus des policiers », a expliqué Leopoldo Maldonado Gutierrez, avocat du Centro de Derechos Humanos Miguel Agustín Pro Juárez A.C, à Infosmexique.

« Le droit pénal peut ouvrir la voie à d’autres chefs d’accusation, par exemple, dégât matériel, une faute administrative, mais en aucun cas on peut parler de privation de liberté, car la loi précise qu’il faut d’autres éléments objectifs et subjectifs pour qu’un tel délit soit commis ».

Dans tous les cas, même si les juges persistent à croire que les policiers ont été effectivement pris en otage par les commerçants, la responsabilité de Jacinta ne peut être mise en cause, car elle n’était pas présente durant l’incident.

« Pendant le temps où les policiers étaient supposément pris en otage, Jacinta vendait des boisson sur le marché aux cotés de sa famille, puis elle est allée à la messe, et s’est rendue à la pharmacie pour se faire faire une injection », raconte Leopaldo Maldonado.

« A un moment, Jacinta s’est approchée pour écouter les négociations entre les autorités et les commerçants, et on l’a prise en photo, c’est cette photo qui sert de base à l’accusation, mais même le journaliste qui l’a prise a déclaré lorsqu’il a été appelé à comparaître devant le juge qu’il n’est pas certain que les policiers aient été pris en otage ».

Face à cette situation, Amnistie Internationale et le centre PRODH considèrent que Jacinta a été choisi comme bouc-émissaire par les autorités pour sa grande vulnérabilité. Car Jacinta parle peu l’espagnol, on ne lui a pas accordé d’interprète durant le processus judiciaire et personne n’est venu lui expliquer qu’elle avait le droit de se défendre. Elle représentait donc un blanc facile pour les autorités qui désiraient prendre des représailles contre les commerçants de Santiago Mexquititlán.

Plusieurs organisations civiles exigent la libération immédiate de Jacinta

Compte tenu de ces irrégularités, Amnistie Internationale et le centre PRODH exigent la libération immédiate de Jacinta.

Mais les autorités mexicaines ne semblent pas de cet avis.

Bien que le 17 juillet 2009 la Commission des Droits de l’Homme ait résolu que de graves irrégularités ont été commises durant le procès, Jacinta continue à l’heure actuelle en prison. Et elle pourrait y rester longtemps encore. Car après que la défense ait fait appel, la justice mexicaine a décidé de recommencer le procès et confronter les différents témoins, un processus qui pourrait durer plusieurs mois, voire plusieurs années. Aux grands dammes de Jacinta et de sa famille. Car comme le dit Jacinta, « quand tu fais quelque chose de mal, tu te dis « j’ai fait l’erreur, je dois payer les conséquences », mais quand tu sais que tu n’as rien fait, c’est très dur…. »

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